Billet à 2016


 

Salut ma sœur

Je sais que tu t’apprêtes à venir prendre ma place ici-bas. Tu peux même en être ravie. C’est normal, car tu n’en sais rien de ce qui t’attends. Moi aussi je suis passée par là. Oh que grande était ma réjouissance quand sur toutes les lèvres j’ai vu sortir des « bonne année 2015 » même avant mon arrivée ! J’ai cru que j’allais être meilleure comme ils l’ont souhaité vraiment. Mais… Déception !

J’ai vu des choses horribles en Haïti ma sœur ! J’ai vu la solidarité décapitée dans un jeu sordide, où chacun est le tremplin de l’autre. J’ai vu l’amour mutilé et la fraternité asphyxiée. J’ai vu la honte partout, mais nulle part on n’a honte.

J’ai vu un peuple qui se ridiculise par des actions assaisonnées de vilénie. J’ai vu des mains sales, trop de mains sales, qui se pullulent dans les institutions publiques. Et j’ai vu des envies folles. J’ai vu des illusions plantées dans des sols arides. J’ai vu des espoirs ankylosés. J’ai vu le dégout. Une langueur combien stoïque.

J’ai vu de « polis p’tits chiens » qui s’engouffrent dans leur noirceur cognitive. J’ai vu un peuple où chacun se complait à mentir. La politique devient l’école des fans. Ici tout le monde peut être « chef ».

J’ai vu du sang dans les yeux de parents qui en ont marre de verser des larmes timides. J’ai vu jour après jour, heure après heure, la peur qui offre un spectacle sans fin. J’ai vu la mort. De sales morts. Mort honteuse et lâche. Demande à Lencie ou à Mass Design. J’ai vu la détresse. Mais entre-temps, l’indifférence aussi.

Des citoyens qui vendent leur liberté de manifester à des politicailleurs afin de se procurer le manger et le boire pour une demi-journée. Tout le monde s’en moque de la « chose commune ». L’engagement citoyen est inexistant.

Des hommes politiques qui  ne font qu’amasser les richesses de la nation à leur propre profit. Un peuple qui ne vit que de promesses chimériques. J’ai également entendu leurs discours propagandistes et leurs messages intoxiqués qui amadouent ce peuple sans défense.

Sache, ma sœur 2016. Tous mes vêtements dégagent une odeur de fraudes. Mes yeux ont tellement vu de corruption que mon regard n’est plus le même. Les « élections » d’ici me restent un véritable cauchemar.

Je ne t’écris pas pour te décourager ma sœur, mais pour t’aider à ne pas te faire de vains espoirs. Moins tu espères de bonnes choses, moins tu auras de frustrations. Surtout toi qui dois passer 366 jours ici. Laisse les gens jouer leur traditionnel jeu d’hypocrisie. Laisse-les se partager des souhaits non calculés. Mais moi qui ai vu beaucoup de choses ici,  je te conseille de ne pas espérer que tu sois meilleure. Tant que ce pays a  ces modèles d’hommes aux timons des affaires, aucune d’entre nos années sœurs ne sera bonne comme on le souhaite toujours.

Très sympathiquement à toi,

2015 !

Ritzamarum Zétrenne

 

 

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